Cela faisait longtemps que je voulais écrire une pièce pour flûte seule. En fait, depuis Eolia, une oeuvre des années 80 dans laquelle j'avais essayé de détourner le jeu volubile normal de la flûte tel qu'on l'employait dans la littérature traditionnelle. Dans Loops, le son de la flûte et les techniques de jeu importent moins finalement que les processus de transformation mis en œuvre. Le titre de la pièce annonce et désigne déjà le principe d'écriture. Il y a un côté allitératif dans ce titre et je tiens absolument à conserver l'esprit qui caractérise ce genre de pièces. Je pars de petits motifs rythmiques qui se répètent et se transforment au fur et à mesure. En fait, ce sont des formules simples qui, par ajout ou soustraction successifs, finissent par créer elles-mêmes de nouvelles boucles. Ce qui m'intéresse, c'est ce qu'il y a entre les deux, la façon dont on y arrive et dont on en repart. Le résultat du processus m'importe peu. La boucle, elle, m'intéresse parce qu'il y a répétition et la répétition m'intéresse parce qu'elle est au fondement de toute transformation dans le temps. Dans cette œuvre, le principe est poussé à l'extrême. Avec Open music, j'ai trouvé un système pour implémenter cette idée de répétition et de bouclage, tout un programme qui permet de prévoir la façon dont doivent se dérouler les transformations. Je n'avais encore jamais utilisé la boucle de façon aussi dépouillée, avec un seul instrument. Cette idée est pourtant prédominante dans toutes mes pièces. Il y a toujours eu ce principe de répétition dans ma musique. Sur le plan formel, il permet à l'auditeur de mieux comprendre, d'avoir des repères. Loops est une pièce que j'ai faite de façon très objective, mais à partir d'éléments intuitifs, improvisés vocalement lors de conférences. Je tente certaines choses ludiques. Je les teste... Un peu à la manière de Schoenberg lorsqu'il construisait ses contrepoints et ses carrés...
Philippe Hurel, INSIT, Musique contemporaine, lettre d'information, décembre 1999.
INSIT, Musique contemporaine, lettre d'information, décembre 1999