Mais peut-être n’est-il pas possible d’écouter le son de cette manière. Depuis les profondeurs de ses origines, le moindre son porte en lui un monde d’une richesse infinie.
Je voudrais que l’expérience de ce son nous fasse ressentir l’énergie de la nature qui circule dans les profondeurs les plus lointaines de notre être, qu’elle nous fasse prendre conscience d’un profond silence. Tout son est comme la vapeur d’un nuage délicat qui, en traversant ses phases successives, superpose des couches de temps les unes sur les autres. Comme les nuages de couleur qui flottent dans telle peinture de Mark Rothko, comme ceux qui s’évanouissent à l’horizon d’un paysage de Turner, comme ceux d’un tableau bouddhiste japonais sur lesquels ont pris place les musiciens de cour qui accompagnent la descente du bouddha. Il y a toujours des nuages qui flottent dans les lieux de révélation du sacré.
Ici, l’alto incarne le principe masculin et l’accordéon le principe féminin. L’alto est la voix humaine, l’accordéon l’écho en sympathie de cette voix, telle une matrice fertile qui l’enceint. Les deux instruments façonnent un paysage musical mythique.